La raison pour laquelle certaines personnes disent « Vous pouvez le faire aussi ! » en donnant des cours sur l’IA est simple : il faut bien moins de créativité pour gagner de l’argent en enseignant comment gagner de l’argent avec l’IA que pour en gagner réellement avec l’IA. Laissez-moi vous donner quelques exemples similaires.

1. Livres numériques

Publier un livre numérique n’est pas très difficile. Mais devenir célèbre grâce à un livre numérique ? C’est une autre histoire. (Y a-t-il même beaucoup de cas comme celui-là ?) En réalité, beaucoup moins de gens lisent que de personnes qui regardent des vidéos. Et parmi ceux qui lisent, la probabilité qu’ils choisissent un « livre » — et encore moins un « livre numérique » — plutôt qu’un billet de blog ou un post de communauté est faible. Cette probabilité diminue encore si l’on considère qu’ils recherchent un titre correspondant exactement au sujet de mon livre, et encore davantage qu’ils soient séduits par l’aperçu au point de l’acheter. Écrire un livre pour les personnes en dépression ne signifie pas que, dès sa publication, une foule de personnes en détresse émotionnelle se précipitera pour lire attentivement chaque phrase et y trouver du réconfort. C’est l’une des illusions les plus répandues. L’achat d’un livre repose sur le désir de possession : il faut que le lecteur veuille l’avoir dans sa bibliothèque (numérique) pour pouvoir le consulter à tout moment, et ce n’est pas facile. (Et n’oublions pas : le marché du livre numérique n’est pas seulement composé d’ouvrages écrits pour le format numérique, mais aussi de versions électroniques de best-sellers papier mondiaux, qui sont autant de concurrents.)

En revanche, dès que vous changez le sujet pour « Gagner de l’argent avec les livres numériques », le processus devient beaucoup plus simple. Il existe bel et bien un marché : des personnes à la recherche d’un revenu complémentaire facile. Des gens qui ne veulent pas interagir avec d’autres, qui ne veulent pas de travail physique, et qui souhaitent gagner de l’argent en racontant leur propre histoire, à leur manière. L’auteur de livre numérique n’a pas besoin d’une expérience unique comme un écrivain traditionnel, ni d’un style littéraire raffiné et artistique acquis au fil des ans, ni de s’immerger entièrement pendant des années dans l’univers lié au sujet du livre. L’absence d’éditeur comme filtre rend la barrière d’entrée encore plus faible. Pas de délais imposés, seulement une petite commission prélevée par la plateforme. Et ceux qui veulent apprendre quelque chose — ici, comment gagner de l’argent avec un livre numérique — ont souvent l’impression que l’achat d’un cours ou d’un livre les rapproche déjà de cet objectif, ce qui augmente la probabilité d’achat.

Quand on leur dit : « Voici comment écrire, éditer, concevoir la couverture et vendre votre livre numérique », et qu’on accompagne cela d’un très petit nombre d’exemples de réussite — « Regardez, cette personne a gagné beaucoup d’argent avec un livre numérique » —, il est naturel qu’ils soient tentés. C’est un peu comme le modèle de franchise tentaculaire (!) à la mode aujourd’hui. Il peut souvent être plus rentable de convaincre quelqu’un d’ouvrir un restaurant que de gérer soi-même un restaurant à succès.

2. Musique classique

Il en va de même pour la musique classique (mon ancienne spécialité). Réussir en tant que musicien classique actif est extrêmement difficile. Le public qui consomme de la musique classique est déjà réduit (un fait que je n’ai pas vraiment ressenti pendant mes études), et encore moins nombreux sont ceux qui feront l’effort d’assister à un concert. Se faire connaître auprès de ce public est particulièrement compliqué par rapport à d’autres domaines. Alors, comment la majorité des diplômés en musique classique gagnent-ils leur vie ? Grâce à l’enseignement. L’ironie, c’est qu’il est difficile de trouver quelqu’un qui dira : « Votre interprétation est magnifique », mais plus facile de trouver quelqu’un prêt à prendre des cours auprès de cette même personne. (Combien d’élèves s’inscrivent dans une école de piano parce qu’ils ont été émus par le jeu de leur professeur ?)

L’enseignement est, à bien des égards, un moyen simple de gagner de l’argent. La véritable éducation, selon moi, devrait se faire dans un style d’apprentissage en atelier — un maître transmettant son savoir-faire à un apprenti. Mais cela ne rapporte pas. Ainsi, dans de nombreux domaines, on voit apparaître plus de personnes qui gagnent de l’argent en vendant du rêve à ceux qui fantasment sur un métier qu’en l’exerçant réellement à son plus haut niveau. L’explosion des cours sur l’IA s’inscrit, à mon avis, dans cette même tendance.

Remarque

Bien sûr, même moi — celle qui écrit ces lignes —, j’ai pensé : « Et si je pouvais gagner de l’argent avec l’IA ? », et j’ai activement utilisé l’IA dans le codage, l’écriture et le design. Ce que j’ai constaté, c’est qu’il existe des cas où il n’est pas gênant que l’usage de l’IA soit évident, et d’autres où, dès que cela se voit, l’intérêt des gens chute brutalement et on est vite ignoré. Mais cela, je le développerai une autre fois.